Après les nageurs, ce sont les gymnastes britanniques qui ont posé leurs sacs de sport dans la cité des sacres. Les JO 2024 ont vraiment commencé à Reims, Terre de Jeux.
Croix de bois, croix de fer ! Si la Team GB de gymnastique artistique ment en évitant tout pronostic, elle ira tout droit… au paradis olympique. Vous l’avez compris : la sélection britannique entend vivre cachée à Reims où elle a choisi d'implanter l’un de ses centres de préparation en vue des Jeux de Paris. Depuis lundi, six demoiselles et six jeunes gens martyrisent les agrès de René-Tys ou plutôt tentent de les apprivoiser.
Mais, attention, dans un peu moins d'un an, du 27 juillet au 5 août 2024, le moment ne sera plus aux approximations. Il s’agira tout simplement (!) de signer un sans faute pour ces ambitieux gymnastes. Ça tombe bien, Pete Ambrose, le Sport Engagement Manager n’a laissé aucune place à l’à-peu près.
Prêt pour… 2028
Quand la délégation britannique a fait part de son intention de préparer les JO dans la cité des sacres, ce « super chef de projet(s) » a bien sûr émis un préalable : il faut que les différents agrès soient les mêmes que ceux qui équiperont l’Arena Bercy. Un autre exemple : les points de chute de la Team GB pour les Jeux... 2028 à Los Angeles sont déjà choisis et validés.
Ni une, ni deux, la municipalité d’Arnaud Robinet a donc pris contact avec l’équipementier Abeo (basé à Rioz en Haute-Saône) et sa marque Gymnova, une habituée des grands rendez-vous de gym. Objectif : équiper ses installations en agrès, tapis, matelas de réception et autres accessoires. « Nous avons investi 505 386 € à René-Tys dont 39 290 € pour l’achat de deux rings. » Un bel héritage pour l’AGR, le seul club de gymnastique artistique de l’agglo rémoise.
A LIRE PLUS BAS
Reportage sur la séance ouverte au public
Raphaël Blanchard, l'adjoint délégué aux sports
L'AGR, Association Gymnique Rémoise
REPORTAGE
Sages comme des images
On les avait prévenus qu’il ne fallait surtout pas déranger les hôtes britishs. Alors, les enfants du Centre de loisirs Martin Peller de Reims et leurs cadres, le directeur Léo Bar, les animateurs sportifs Théo et Killian, se sont assis sagement dans les gradins de la salle de gym flambant neuve de René-Tys.
Les gymnastes britanniques et leur leader Gianni Regini-Moran, un habitué des podiums internationaux, ont tout d’abord écouté religieusement les consignes de leur staff. Puis, ils se sont dispersés vers les différents agrès. Rien de spectaculaire. Rien de nature à briser la réserve des enfants du centre de loisirs.
Les visages s'émerveillent
Un peu plus tard, les demoiselles sont arrivées. Jessica Gadirova a investi le sol, son exercice de prédilection. Ses camarades se sont dispersées aux barres asymétriques, au saut de cheval… Comme par hasard, c’est ce dernier agrès, situé tout près du public, qui a permis de débrider l’atmosphère. Un salto par-ci, une vrille par-là, une impulsion délicate sur l’engin afin de transformer la vitesse de course en impulsion verticale et voilà les visages qui s’émerveillent, les applaudissements qui crépitent, les rêves qui naissent.
Les enfants du Centre de loisirs Martin Pelleret leur directeur ont savouré. Peut-être ont-ils vu de futurs champions olympiques...
Pas sûr pourtant que ces six jeunes femmes et ses six jeunes gens aient suscité des vocations. Chahine, 8 ans et demi, avoue que ses seuls rapports avec la gym viennent « des roulades et des grands écarts de sa petite cousine. » Les acrobaties les plus abouties ne le détourneront pas de sa passion pour le foot. « Je viens de signer à Cormontreuil », lâche-t-il très fier de son mercato.
D’une famille très sportive – papy footballeur, maman basketteuse, papa coureur – il n’envisage pas de balader sa frêle mais énergique silhouette de milieu de terrain au four et au moulin sur les tapis de gym de René-Tys aussi rutilants soient-ils.
Après deux heures d’entraînement, les gyms quittent leur cathédrale (sportive) rémoise. Les enfants de Martin Peller les imitent. C’est sûr, leurs yeux vont briller ce soir. Leur sommeil sera visité par les exercices qu’ils ont admirés quelques heures plus tôt.
Raphaël Blanchard : « Une belle aventure »
Raphaël Blanchard (photo) est un adjoint délégué aux sports heureux ! Le partenariat unissant la ville de Reims à la Team GB ressemble en effet à un mariage prolifique. « C’est une belle aventure qui a commencé en 2020 » quand la structure britannique a jeté son dévolu sur la cité des sacres pour préparer les JO Paris 2024.
Bien sûr, il a fallu rééquiper les 1200 m2 de la salle de gym de René-Tys avec le même matériel (Gymnova) que celui qui accueillera l’élite mondiale à l’Arena Bercy dans un peu moins d’un an.
Cet investissement de 505 386 € se transformera en un inestimable héritage quand les ors olympiques se seront évanouis. Pour autant, l’effort important consenti à cette occasion ne se sera pas fait à fonds perdus. L’ancien matériel a été déposé et sera vendu en lots via Agorastore (le site de ventes aux enchères du matériel d'occasion et des biens immobiliers des collectivités, entreprises et organismes publics).
« Construire autour du sport »
La belle aventure évoquée par l’adjoint en charge des sports à Reims ne se résume pas en un accueil de futurs médaillés. « Avec la Team GB, nous voulons construire autour du sport, avec nos clubs sportifs, avec nos écoles, avec les fédérations des disciplines concernées, avec les villes qui, elles aussi, accueillent certaines délégations de la Team GB comme Clichy et Saint-Germain-en-Laye. »
Et pour qu’elle soit complète, « on espère que cette belle aventure ne s’achèvera pas en 2024. On travaille pour cela. »
Le club des cinq
La Team GB sera reçue cinq sur cinq dans sa préparation du rendez-vous aux cinq anneaux. Entendez par là que les Britanniques ont identifié cinq disciplines qui prépareront en partie les Jeux à Reims. Outre la nageurs (qui ont déjà investi les lieux en juin) et les gymnastes (en ce moment), les trampolinistes, les boxeurs et les pongistes espèrent transformer les litres de sueur déversés à Reims en bulles de champagne pour fêter leurs médailles à Paris.
Les dents longues
Six médailles (dont deux en or) lors des championnats du monde 2022, neuf breloques (dont quatre en or) aux championnats d’Europe 2023 : les Britanniques vont avoir du mal à se cacher quand il s’agira d’établir la liste des favoris pour les Jeux. Jessica Gadirova sera épiée par tous. Championne du monde à Liverpool 22l, d’Europe à Antalya 23 (ainsi que lors des deux éditions précédentes), la Britannique d’origine azerbaïdjienne domine le sol et le concours général.
Des disciplines à fort enjeu
A raison de six heures d’entraînement par jour, cinq jours sur sept, les British rémois ne ménagent pas leur peine pour justifier leur statut (à venir) de favoris. Leur Royaume compte sur eux. La gym comme la natation « sont des disciplines à fort enjeu, à gros potentiel de médailles », conclut Pete Ambrose, le responsable de cette Team GB (photo).
Le vivier de l’AGR
Christophe Jeanty (photo), 34 ans de licence dans le club, connaît son association gymnique rémoise sur le bout des doigts. Entraîneur des GAM et des GAF (gymnastique artistique masculine, féminine), il sait que cette section traverse des heures difficiles. « On est dans le creux de la vague mais cette saison, nous allons relancer des groupes de performance. »
Quand on lui demande si l’avenir sera rose, son visage s’illumine et laisse percer un sourire prometteur. Mais, pour que les petites pépites de l’AGR éclosent et brillent au niveau national, il faudra du temps, beaucoup de temps. De la persévérance aussi, beaucoup de persévérance.
Pour l’instant, les résultats viennent de la gymnastique rythmique qui privilégie l’esthétique, la danse plutôt que les acrobaties de l’artistique. Margaux Moine a décroché un titre national la saison dernière Son entraîneure arménienne Hériné Galtian espère que cela donnera des idées aux habituées de la poutre ou autres barres asymétriques. Ce serait bien le diable si aucun talent ne pointait le bout de son nez dans les années à venir. Le club comptait 780 licenciés la saison dernière…
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